Depuis le 1er février 2023, la Banque de France a de nouveau augmenté le taux d’usure. Ce taux qui était historiquement ajusté tous les trimestres sera dorénavant révisé chaque mois et ce jusqu’au 1er juillet 2023.
Taux d’usure, définition et mode de calcul :
Dans le cadre d’un achat immobilier, le taux d’usure désigne le taux d’intérêt maximum légal que les banques et autres établissements de crédit sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils accordent un prêt. Il a été créé pour protéger les emprunteurs contre l’augmentation anormalement forte et rapide des taux d’intérêts et ainsi limiter leur endettement. Le taux d’usure prend à la fois en compte le taux nominal du crédit immobilier mais aussi le taux de l’assurance-emprunteur ainsi que les frais de dossier et les frais de courtage.
Fixé par la Banque de France, ce taux d’usure était jusque-là calculé une fois par trimestre, à partir des taux moyens constatés au cours des 3 derniers mois augmentés d’un tiers. Les différents taux d’usure étaient alors publiés au Journal officiel à la fin de chaque trimestre et faisaient office de seuil légal à ne pas dépasser pour le trimestre suivant.
Le problème, c’est que les taux d’intérêt pour les crédits (qui eux sont ajustés chaque mois voire parfois chaque semaine) remontent trop rapidement par rapport à ce taux d’usure. En conséquence, depuis quelques mois, les banques préfèrent fermer le robinet du crédit plutôt que de perdre de l’argent.
Pourquoi une réévaluation mensuelle du taux d’usure ?
Sous l’effet de l’inflation, la Banque Centrale Européenne (BCE) a relevé ses taux directeurs afin de limiter son déficit. Une situation qui a conduit automatiquement les établissements bancaires à augmenter, dans la foulée, leurs taux d’intérêt. Or, les banques ont très vite été confrontées au plafond de verre que constitue le taux d’usure. En effet, les taux d’intérêts (sources de revenus et garantie de rentabilité pour les banques) ne peuvent légalement pas dépasser ce seuil.
Une révision du taux d’usure tous les trimestres ne collait donc plus avec la réalité du marché. Les taux immobiliers augmentant trop rapidement, nombre de dossiers se retrouvaient bloqués. D’ailleurs, la production de crédits immobiliers, tant en montant global qu’en nombre de prêts accordés, a chuté de près de 20% en 2022, avec un recul qui s’est amplifié sur la fin d’année. Une telle chute ne s’était pas constatée depuis la crise des subprimes (crise financière internationale venues des États-Unis en 2008).
Les représentants du secteur bancaire ont donc pointé du doigt l’augmentation trop lente du taux d’usure, qui freinait la hausse des taux d’intérêt. Afin de débloquer le marché des crédits, la Banque de France a préconisé au ministère de l’Économie de réévaluer temporairement le taux d’usure une fois par mois et non plus une fois par trimestre. Ce nouveau mode de calcul, officialisé par un arrêté de Bercy, est entré en vigueur le 1er février 2023 et ce pour une durée de 6 mois (jusqu’au 1er juillet 2023). La prochaine hausse du taux d’usure devrait donc avoir lieu le 1er mars 2023.
Cet ajustement technique a donc été mis en place dans le but de maintenir l’objectif de protection des emprunteurs qu’apporte le taux d’usure, tout en évitant une situation où ce même taux d’usure deviendrait un facteur de rationnement de l’offre de crédit.
Achat immobilier : que va changer la révision mensuelle du taux d’usure ?
Des accords de prêts plus faciles à obtenir…
Depuis plusieurs mois, les emprunteurs se retrouvaient pris en étau entre un taux d’usure trop bas, à l’origine conçu comme un bouclier contre des taux bancaires abusifs, et les grilles de taux de plus en plus élevées des établissements bancaires. Cette actualisation plus rapide du taux d’usure devrait ainsi permettre aux candidats à l’achat dont le dossier se retrouvait bloqué pour cette raison de finalement décrocher leur prêt immobilier. En revanche ils sont susceptibles de se heurter à la hausse du taux immobilier.
…mais une remontée des taux de crédit
Cette révision mensuelle du taux d’usure n’est en effet pas dénuée de risque puisqu’elle pourrait contribuer à l’accélération de la remontée des taux de crédit.
Si la mesure, qui n’est que temporaire, pourrait relancer le marché de l’immobilier et débloquer certains dossiers, elle présente aussi des risques pour les Français souhaitant réaliser un achat. Car cette remontée du taux a un coût pour l’emprunteur. À titre d’exemple, lorsque le taux d’un emprunt de 150.000 euros sur 20 ans passe de 1% à 2%, le coût du crédit augmente d’environ 16.500 euros. Le marché de l’immobilier ne sera donc pas débloqué à n’importe quel prix pour les Français.
Un taux d’usure plus réactif mais des taux d’intérêt en augmentation
Pour conclure, on peut estimer qu’une révision mensuelle du taux d’usure risque de contribuer à l’accélération de la remontée des taux de crédit qui pourraient atteindre 4% sur 20 ans dès cet été. Mais mieux vaut tout de même emprunter à 4%, surtout avec une inflation estimée autour 6 à 7%, que de ne pas pouvoir obtenir un crédit et renoncer à son projet immobilier.
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